Face à l’austérité : « La culture est un droit »
Le Maire d'Ivry et son adjointe à la culture déterminé-es
Le vol aggravé commis par le gouvernement dans les ressources des collectivités marque une énième rupture des engagements de l’État. Cette décision est intenable pour les villes, les départements et les régions. Ce choix, s’il devait se confirmer, aurait de lourdes conséquences sur l’ensemble des politiques publiques locales.
Plusieurs président·e·s de collectivités de droite n’ont pas tardé à indiquer la première cible : le service public de la culture. Le mépris qui se dégage de certaines prises de position n’a d’égal que l’ignorance de la gravité de la situation : la crise que nous vivons, celle d’une société désorientée, fracturée, en panne, est une crise culturelle. Nous n’avons pas d’avenir si nous ne refusons pas fermement cette atteinte sans précédent aux droits culturels.
Faudra-t-il, une fois de plus, rappeler que la France a ratifié, en 2001, la convention de l’Unesco sur la diversité culturelle ? Elle énonce en particulier que « les droits culturels sont partie intégrante des droits de l’homme » et que « la diversité culturelle est, pour le genre humain, aussi nécessaire que l’est la biodiversité dans l’ordre du vivant ». Faudra-t-il, une fois de plus, répéter leur conclusion ? « Les seules forces du marché ne peuvent garantir la préservation et la promotion de la diversité culturelle (…). Il convient de réaffirmer le rôle primordial des politiques publiques. »
Elles ne sont donc pas une option facultative mais une condition nécessaire. Qu’il s’agisse d’émancipation individuelle ou de faire société commune.
Or l’inégalité territoriale des politiques culturelles de l’État – qui dépense 20 fois plus pour un habitant de Paris que pour les autres – est jusqu’à ce jour compensée par les collectivités territoriales, qui sont les premiers financeurs de la culture en France. Le budget Barnier aura donc un effet ciseaux qui va annihiler cinquante ans de décentralisation. Car la baisse des dotations aux collectivités se double d’une réduction du budget du ministère.
C’est plus d’un milliard qui peut être retranché à la culture au bout du compte, coupant de fait les vivres à des artistes, des compagnies, des festivals, des lieux culturels, des salariés. Les collectivités vont être contraintes d’abandonner des projets construits avec les habitant·e·s, les associations d’éducation populaire et les artistes, d’abandonner des lieux et des événements culturels.
Dans les grandes villes, ce sont les écoles supérieures d’art et conservatoires, les opéras et orchestres, les musées, scènes et médiathèques qui seront impactés. Les jeunes ne pourront plus se former aux professions artistiques, les compagnies ne pourront plus créer en région, les citoyen·ne·s n’auront plus d’accès à la lecture publique et au patrimoine, des professions entières vont être décimées.
Nous allons résister de toutes nos forces parce que nous ne le voulons pas. À l’heure où l’extrême droite menace, les politiques culturelles ne sauraient être sacrifiées. Nous ne voulons pas d’une humanité asséchée, empêchée, atrophiée, privée de ses droits culturels fondamentaux.
Nous ne consentirons pas à ce vol aggravé. Nous appelons à prendre la mesure de la gravité de ces choix politiques. Nous appelons à les contester. Nous appelons élu·e·s, syndicats, artistes, actrices et acteurs culturels à se rassembler pour agir ensemble. Immense est notre crainte. Immense est notre détermination.
Les signataires
Pierre Dharréville, Martigues ; Agnès Freschel, Marseille ; Aymeric Seassau, Nantes ; Alexie Lorca, Montreuil ; Jean-Marc Coppola, Marseille ; Nadia Mouaddine, Gennevilliers ; Florian Salazar-Martin, Martigues ; Aline Chassagne, Besançon ; Youssef Ben Amar, Allonne ; Merle-Anne Jorge, Bagnolet ; Vincent Favero, Tremblay-en-France ; Élisabeth Fauvel, Bagneux ; Didier Gérardo, Crolles ; Chantal Carrié, La Trinité ; Christophe Dupin, Tours ; Méhadée Bernard, Ivry ; Luc Mboumba, Créteil ; Jérémy Bacchi, sénateur ; Soumya Bourouaha, députée ; Patrick Malavieille, Gard ; François Asensi, maire de Tremblay-en-France ; Marie-Hélène Amiable, maire de Bagneux ; Patrice Leclerc, maire de Gennevilliers ; Philippe Rio, maire de Grigny ; Patrice Bessac, maire de Montreuil ; Deniz Oztorun, maire de Bonneuil-sur-Marne ; Pierre Garzon, maire de Villejuif ; Philippe Bouyssou, maire d’Ivry ; Jacqueline Belhomme, maire de Malakoff.